Saviez-vous qu’en regardant jouer vos enfants vous pouviez apprendre plein de choses sur leur état intérieur ? Avec cet ouvrage de la psychanalyste Sophie Marinopoulos et son astucieux « ludomètre » reprenez contact avec votre enfance et comprenez mieux celle de votre descendance.
Saviez-vous qu’en regardant jouer vos enfants vous pouviez apprendre plein de choses sur leur état intérieur ? Avec cet ouvrage de la psychanalyste Sophie Marinopoulos et son astucieux « ludomètre » reprenez contact avec votre enfance et comprenez mieux celle de votre descendance.
Sophie Marinopoulos (p.152)
Jouer, c’est sensationnel
Au fond, on n’a jamais oublié à quel point c’est important. A quel point c’est bon, de jouer. Mais… on n’a pas toujours le temps, quand on est grand. Plus toujours l’envie de visiter la planète du Petit Prince, ou de s’attarder sur un galet en forme d’escargot.
Le premier geste de l’ouvrage de Sophie Marinopoulos, premier-né de la nouvelle maison d’édition LLL (Les Liens qui Libèrent), est de rouvrir pour son lecteur une porte qui donne directement sur l’enfance. Celle des autres, de ses petits, mais aussi la sienne. Sensations fines, oubliées, immenses, d’une rêverie au fil de la voix qui lit, d’une odeur de doudou, d’un défi à la course où la vie semble se jouer. Jetant ça et là des mots qui parlent à ce continent lointain du jeu enfantin (« Tout est bon à prendre, tout est métabolisable, transformable en scénario d’illusion », p.150), comme autant de petits cailloux blancs dans la forêt du quotidien, Sophie Marinopoulos dessine avec précision une cartographie ludique qui permettra aux parents de ne plus perdre le nord.
Comprendre l’évolution de l’enfant à partir du jeu
Pourquoi ? Parce qu’à partir du jeu, l’évolution globale de l’enfant peut être ressaisie, comprise, accompagnée. Le titre du livre est éclairant à cet égard : on ne va pas parler du jeu comme activité spécifique, isolée, mais bien comme lieu où se situe l’enfant – plus ou moins loin sur le chemin de son indépendance et de sa conscience de lui-même, au fur et à mesure qu’il grandit. Ainsi le ludomètre s’échafaude-t-il chronologiquement, au fur et à mesure d’acquis intellectuels et moteurs bien connus (s’asseoir, marcher, parler….) mais ici conçus comme les aspects d’un vaste en-jeu : la liberté.
Etre libre, c’est conquérir : comment, par le jeu, l’enfant domine-t-il sa crainte (que maman disparaisse, qu’il parte lui-même en morceaux, de ne plus se retrouver) ? Comment le jeu est-il d’abord une expérience du monde ?
Etre libre, c’est échanger : comment le jeu est-il aussi socialisant ? Et un mode de communication où se formule l’indicible, quand on n’a pas encore les mots ?
Etre libre, c’est devenir : comment le jeu accompagne-t-il les grandes questions relatives à l’identité, à la sexualité, à l’amour, à la filiation, au savoir ?
Le ludomètre : un repère ludique
Le ludomètre, qui analyse le jeu de l’enfant selon son âge, est donc bien un moyen d’observer comment il va, ou plutôt comment il est au monde, tandis que la collectivité prend pour lui une place grandissante. Le découpage en chapitre est ainsi très pratique : la lecture avance au fur et à mesure de la croissance, et l’on n’est pas obligé de tout lire pour comprendre le principe du ludomètre (mère d’un enfant de cinq ans, j’ai moi-même commencé par la fin…. Avant de dévorer le reste – ndlr). Sophie Marinopoulos, psychanalyste, propose à chaque fin de chapitre des fiches qui résument les critères selon lesquels une petite visite chez le psychologue peut s’avérer utile, dédramatisant complètement une démarche qui apparaît à cette lecture aussi simple et évidente que nos consultations médicales. Aussi, une liste des jouets adaptés à chaque moment de l’évolution ludique est suggérée, et des points synthétiques décrivent les petites conquêtes motrices qui ponctuent la croissance et sont autant d’étapes incontournables.
Respecter l’enfant dans son désir d’expérience
Structurant, langage en soi, le jeu cache « toujours le sens profond de ce que nous vivons » (p.16). L’analyste est comme un détective avec lequel nous menons l’enquête sur les significations et intérêts de tel ou tel jeu, sans qu’aucune grille de lecture ne s’applique : il s’agit surtout de respecter l’enfant dans son désir permanent d’expérience et de réassurance.
Ceci paraît évident, tout simple. Et pourtant, c’est une révolution qui peut bousculer certains principes éducatifs, et questionner des réactions réflexes. Exemple : « L’enfant qui voit l’un de ses pairs rire en tenant une petite voiture rouge va chercher à posséder non pas la voiture, mais le rire qu’elle procure. La voiture bleue que vous lui proposez n’a pas les qualités de la rouge : elle ne rit pas. A deux ans, être et avoir sont des équivalents » (p.19). Quel parent n’a pas reproché à son enfant de ne pas partager, ou de prendre un jouet à l’autre, tout en sachant au fond que cette notion est en décalage avec ce qu’il vit ? Le ludomètre nous invite à ne plus projeter nos sentiments et notre vécu d’adulte sur notre enfant, mais à le comprendre dans son contexte pour une parole éducative et juste.
Ecouter, comprendre
Ainsi Sophie Marinopoulos se livre-t-elle à une vaste entreprise de déculpabilisation : l’enfant n’est jamais « méchant » (peu partageur, bagarreur, désagréable, pot de colle, comédien…), il connaît seulement une agression ou une épreuve qui met sa peau psychique à vif. Ou bien il expérimente, il apprend, il se rassure et connaît avec son corps (en jetant des jouets, en sentant sa nourriture, en s’affalant, en tripotant). Postures, gestes, attitudes : le ludomètre réinterprète les actes de l’enfant selon l’épreuve psychique qu’il traverse, tout en donnant des clés essentielles pour lui répondre, qu’il ait 3 mois, 2 ans ou 5 ans.
Ici, le lecteur (enfin !) voit se dissoudre la querelle lassante et tellement médiatisée entre « permissivité » et « retour de l’autorité » au profit d’une écoute permanente, privilégiée, de ce qui se formule dans et par le jeu et le corps. Le ludomètre nous donne les clés pour nous départir des règles, des crédos, des chapelles, et restaurer la bonne entente. Que représente le défi, pourquoi il est structurant ? (comme sauter dans une flaque….). Comment réagir aux jeux sexuels ? Comment adapter la règle à la temporalité d’un enfant qui a besoin de s’en affranchir….pour mieux l’accepter ? Pourquoi le doudou est-il sacré ? Pourquoi l’enfant régresse-t-il à tel moment ? Pourquoi et comment certains jeux sont-ils des passages essentiels vers une croissance heureuse ? (Les jeux de bouche du bébé, puis le cacher-coucou avant deux ans, enfin le cache-cache, le déguisement, le faire-semblant, et les jeux de société pour les grands). Le lien entre le jeu de la petite enfance et la capacité à apprendre et à se séparer des plus grands est exposé avec une grande clarté, qui vaut tous les manuels du monde. Expliquant, déculpabilisant, décrivant le parcours psychique de l’enfant jeté dans la vie, Sophie Marinopoulos désarme la colère et l’angoisse nés de l’incompréhension et du doute.
Une sensibilité éprouvée
Sa précision, l’auteure la doit à une longue pratique auprès des enfants et de leurs parents. Elle fut l’élève du professeur Serge Lebovici, et assista aux consultations de la psychanalyste Caroline Eliacheff, lorsque cette dernière reprit la consultation de Françoise Dolto à Issy-les-Moulineaux. Exerçant depuis 1985 à la maternité du CHU de Nantes, où elle accompagne les maternités vulnérable, elle suit aussi en consultation privée thérapeutique des bébés, des jeunes enfants et leurs parents. Elle a créé le premier centre de prévention et de promotion de la santé psychique (PPSP) à Nantes ainsi que son lieu d’accueil Les pâtes au beurre. Elle est l’auteure de nombreux ouvrages, dont : Dans l’intime des mères et Le corps bavard, (Fayard).
Le corps qui écoute l’enfant
Chaque fois, il est question du corps de l’enfant et de sa parole, qui sourd de ses jeux, de ses gestes, du lien affectif avec ses parents, et qui demande à être entendue et surtout partagée (on parle avec le bébé, rappelle-t-elle). L’analyste apprend ainsi à travailler avec son propre corps, à faire de celui-ci une surface d’écoute. « Dolto disait : A un moment, il faut passer par cette épreuve même du corps qui écoute. C’est là le travail de tout analyste, qui ne travaille pas avec les mots, en particulier avec les tout-petits, mais avec un langage de sensations éprouvées, un langage intérieur ». (Sophie Marinopoulos, « On pense autant avec sa peau qu’avec son cerveau », Entretien,Psychologies.com)
Dialogue entre psychanalyse et éducation
Ecoute du corps que, précautionneusement, l’auteure nous invite à tenter. Dans cette perspective, elle convoque les travaux des grands psychanalystes du XXe siècle avec beaucoup de simplicité, parvenant à un ouvrage à la fois savant et directement opératoire, qui ne demande aucune culture spécifique. Au fil des pages, on croise Freud, Dolto ou, surtout, Winnicott, dans un dialogue passionnant entre la psychanalyse et l’éducation. Enfin, Sophie Marinopoulos s’appuie sur de nombreux exemples, « vignettes cliniques » qui développent un cas particulier , et constituent autant de projections émouvantes dans ce continent de l’enfance dont nous retrouvons, le temps d’un paragraphe, les sensations enfuies.
Une lecture essentielle.
« Dites-moi à quoi il joue, je vous dirai comment il va » par Sophie Marinopoulos publié aux Editions LLL, Les Liens qui Libèrent – 190 pages – 17,90 €.
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